Si l’on définit un service public d’une part comme un service dont la qualité est garantie par l’Etat et non par la concurrence et d’autre part comme un service accessible à tous, on constate qu’on s’éloigne de plus en plus d’un service public de l’éducation. Sous couvert de réduction de budget, le gouvernement impose l’éducation à deux vitesses. Les réformes des lycées et des universités constituent des maillons supplémentaires dans la mise en place d’une société plus concurrentielle et plus inégalitaire. Ce système formera non pas des citoyens avertis mais de la main d’œuvre qualifiée, mais surtout il exclura les plus démunis afin d’affirmer la position d’une élite déjà en place.
Nous nous élevons contre l’idée qu’il n’existe qu’une seule réforme possible du système d’éducation en France. Nous militons pour une autre école, prête à relever les défis du XXIeme siècle et à répondre au mal être d’une grande partie des jeunes. L’école publique doit garantir une éducation de qualité pour tous. Les lieux d’éducation doivent être considérés comme des lieux de transmission de savoir et de culture qui doivent permettre aux élèves de mûrir et de s’enrichir. Enfin, ce sont également des lieux de formation citoyenne et d’émancipation.
Dépenser pour l’éducation est un investissements de long terme
De 2002 à 2012, 140.000 postes devraient avoir disparu dans l’éducation nationale, dont 35.000 entre 2007 et 2009. Ces suppressions de postes concernent des accompagnant à la vie sociale, des éducateurs, des animateurs et des professeurs. Les dépenses en matière d’éducation sont essentielles puisqu’elles sont un investissement dans l’avenir. En effet si l’on veut prévenir l’exclusion et la reproduction des inégalités, mais aussi former une main d’œuvre qualifiée et mobile, il est nécessaire d’investir dans l’éducation dés le plus jeune âge et tout au long du parcours scolaire. Toute société doit se donner les moyens de sa réussite : réinvestissons en masse dans notre éducation !
L’école, un levier contre la reproduction des inégalités.
Nous l’entendons partout dans les bistros, les cours d’école et dans la bouche des politiciens : l’ascenseur social est en panne et avec lui son outil principal : l’école. Selon le Haut Conseil à l’intégration, alors que 90% des enfants de cadres accèdent à une seconde générale et technologique, contre 42% des enfants d’ouvriers ou d’inactifs y parviennent. Cette inégalité face aux exigences de l’école est visible dés le primaire, puisque les écarts de performances entre enfants de cadres et enfants d’ouvriers sont déjà mesurables en CE2 et perdure jusqu’aux études supérieures. L’origine sociale étant un facteur discriminant pour la réussite des études, des mesures doivent donc être prises sur l’ensemble du parcours scolaire afin de diminuer, voire éliminer ces inégalités éducatives.
Nous devons généraliser l’aide au devoir et augmenter le soutien personnalisé pour les élèves en difficulté. Avec le succès grandissant des organismes de cours à domicile, se creusent les inégalités entre les élèves aisés dont les parents ont les moyens de payer des professeurs particuliers et les autres laissés sur le carreau. On estime que 40% des élèves bénéficieront de cours particuliers entre la maternelle et la terminale ce qui démontre un réel besoin de soutien personnalisé en parallèle des cours collectifs. L’école publique doit offrir un suivi à chaque élève qui en a besoin. En 2008-2009, 725 434 collégiens du public ont bénéficié de l’accompagnement éducatif. Il est nécessaire d’étendre ces heures d’aide au devoir, mais aussi de pratique d’un sport ou d’une langue étrangère, pour que les enfants ne retrouvant pas des conditions favorables pour apprendre chez eux puissent étudier dans les meilleures conditions possibles. Ces heures de suivi ne doivent pas devenir un surplus de travail dans un emploi du temps surchargé, il faut donc revoir la répartition ainsi que le nombre d’heure de cours.Cette aide devra pour être efficace, être une aide individuelle ou en petit groupe d’élève ayant les mêmes besoins, mais aussi adopter une pédagogie différente de celle appliquée pendant les heures de cours. En effet il faut accepter le fait que tous les élèves n’apprennent ni de la même manière, ni au même rythme.
Nous devons en finir avec le couperet du baccalauréat.Le baccalauréat ne doit plus être un « jeu de mort subite ». Les Jeunes Verts demandent à revoir le fonctionnement de la validation des acquis en fin de terminale. Les acquis d’une scolarité ne peuvent être valider intégralement en quelques jours. Aujourd’hui on constate souvent une grande différence entre les résultats au baccalauréat d’un élève et ses résultats au cours de l’année. est donc important. L’examen final jouera toujours un rôle important dans l’obtention du baccalauréat. Mais il est nécessaire d’étudier la mise en place d’un pourcentage de contrôle continu dans le baccalauréat, par exemple par plus d’oraux pour la validation des langues et plus de travaux en groupe tels que les Travaux personnels encadrés.
Cependant l’introduction du contrôle continu ne pourra se faire de manière satisfaisante que lorsque nous auront diminué les inégalités entre les établissements scolaires. L’une des solutions pour réduire les inégalités est de revoir la carte scolaire pour favoriser la mixité, notamment sociale, au sein des établissements, cette nouvelle carte scolaire sera d’application stricte. Si nous constatons un abandon progressif de la carte scolaire, on remarque également que dés sa création des stratégies d’évitement ont été mises en place par les familles aisées pour inscrire leurs enfants dans l’école de leur choix. Mais nous sommes conscients que la seule réorganisation de la carte scolaire ne permettra pas de faire disparaître complètement les inégalités entre établissements, et qu’elle doit s’accompagner d’une juste répartition des moyens, voire d’une mutualisation et d’une coopération entre établissements.
Nous devons créer une école qui ne doit pas être un sanctuaire. D’après une étude de 2002, sept ans après leur entrée au collège, seul un enfant d’immigré sur quatre prépare un baccalauréat général, soit 27% des enfants d’immigrés contre 40% des enfants de non-immigrés. En plus d’instaurer une aide personnalisée dés l’école maternelle pour les élèves ayant des difficultés de langage, il est nécessaire de rapprocher les parents et l’école. En effet l’une des raisons de cet échec, relevé par le HCI, est la sanctuarisation de l’école par les parents. L’école ne doit pas être un lieu qui fait peur mais un lieu ouvert sur le monde. Il faut donc mieux intégrer les parents au sein de l’école. En début de parcours scolaire il est nécessaire d’augmenter les moments de rencontre individuelles entre les parents et les professeurs. Au lycée et à l’université il faut ouvrir ces établissements à la population pour qu’ils accueillent des cours le soir, par exemple des modules d’apprentissage de la langue française pour les parents ne parlant pas français. Mais également aux associations de quartiers et aux associations sportives pour que les établissement scolaire soit un véritable lieu de vie ancré dans leur territoire.
Une école valorisant l’autonomie
L’infantalisation des lycéens durant les mobilisations socialesest symptomatique de la manière dont les jeunes sont considérés au sein de la société : comme des sous-citoyens incapables de formuler une opinion par eux-mêmes. Nous défendons l’idée que nous ne devenons pas autonome lorsqu’on souffle ses bougies à 18 ans, mais que s’est le résultat d’un processus dans lequel l’école a un grand rôle à jouer.
Nous devons apprendre aux élèves à apprendre. Nous ne devrions plus seulement apprendre par cœur un empilement de connaissances, mais privilégier l’acquisition d’outils conceptuels permettant d’apprendre à apprendre et de compétences transversales. L’évaluation est aujourd’hui en France principalement une évaluation sommative, elle évalue presque uniquement la somme des connaissances acquises. De plus les notes données, renvoyant souvent à un échec face à l’objectif du 20, ne sont jamais données dans une perspective dynamique (par rapport à la classe ou par rapport aux résultats précédents de l’élève). Cette conception de l’évaluation fait une grande différence entre ceux qui maîtrisent les codes et les consignes de l’école et ceux qui ne les maîtrisent pas. Il est également nécessaire d’aller vers un apprentissage valorisant la participation, ainsi que l’implication de l’élève et non seulement les savoirs qu’il acquiert, puisqu‘on retient mieux ce qui nous intéresse et ce qu’on à plaisir à apprendre. Nous devons donc sortir de l’école comme un lieu d’échec pour en faire un lieu de plaisir.
Nous devons fonder l’école sur une orientation qui valorise les potentiels.Nous devons sortir du “productivisme scolaire”pour une orientation qui valorise des savoirs et des compétences acquises. Le rôle du conseiller d’orientation doit être l’accompagnement de l’élève dans sa réflexion sur la manière dont il peut et veut mettre en application ce qu’il a appris et quelles sont les matières qu’il souhaite approfondir. A la place d’une orientation fondée sur les potentielles sorties en emploi nous préconisons une orientation fondée sur l’intérêt de l’élève et le plaisir d’apprendre.
Nous devons favoriser l’engagement associatif.L’important ne s’apprend pas seulement à l’école, encourageons les lycéens qui sont bénévoles et membres actifs d’associations ou de clubs. Introduisons dans les résultats du baccalauréat une appréciation globale des activités (associatives, sportives, syndicales, culturelle…) de l’élève au sein ou en dehors des établissements. Il doit en être de même dans les universités. Il faut mettre en place des ECTS obtenus grâce à des heures de bénévolat. Déjà 30 universités en France ont mis cela en place.
Nous devons instaurer une vraie démocratie lycéenne. Il ne s’agit pas de donner son avis sur les frites à la cantine ou sur la couleur des chaises. Les lycéens doivent être non seulement informés mais aussi associés à la vie de leur lycée, être partie prenante dans les choix fait par la direction. C’est pourquoi nous sommes pour que le CVL dispose d’un budget qu’il puisse entièrement gérer afin de soutenir des projets inventés, soutenus et organisés par les lycéens.
Nous devons développer de nouveaux enseignements pour répondre à de nouveaux enjeux.Le monde a évolué, l’école doit donner à chacun les clés pour comprendre ce qui les entourent. Dans un monde où l’on est de plus en plus confrontés aux images, pour vendre des produits, des idées, il est nécessaire de savoir les décrypter. Il faut donner à chaque élève les clés qui lui permettront de comprendre et de prendre du recul par rapport aux images qu’on lui impose. Il fait également permettre à chaque enfant d’apprendre à utiliser Internet (tri de l’information, savoir naviguer,…). L’école doit permettre de réduire la fracture numérique. Enfin il faut faire une éducation à l’environnement dés les plus jeunes âges : tri, diminution de la surconsommation de l’eau et de l’électricité.
Les réformes proposées par le gouvernement ne sont pas les seules possibles. L’école est un des lieux où se forme le futur visage d’un pays. Nous ne devons donc pas renoncer à une école ouverte à tous, donnant les chances à chacun dans les meilleurs conditions possibles. L’éducation doit être une priorité. Ainsi là où le gouvernement souhaite installer l’excellence grâce à la concurrence à outrance et à la sélection, installons l’excellence grâce à la diversité et à la créativité de nos campus.