Dimanche 4 décembre, nous – les Jeunes Ecolos de Toulouse – avons brandi des pancartes et scandé des slogans pro CETA et TAFTA. Ironiques ? Evidemment. Nous avons choisi la formule « une manifestation de droite » pour dénoncer les absurdités de ces accords. Nous expliquons notre refus du CETA, tant sur la manière que sur le contenu.

Le CETA accélère la mondialisation de l’agriculture

« De la viande aux hormones pour booster la croissance » ; « On aime on aime les OGM » (slogans de la manifestation)

Le CETA élimine les droits de douanes et 92% des produits agricoles sont concernés. Il prévoit l’augmentation des quotas d’importation (du Canada vers la France) du bœuf, du porc, du blé tendre et du maïs doux. En contrepartie, il assure l’augmentation du quota d’exportation du fromage vers le Canada.
L’Europe n’a aucun besoin d’importer ces produits du Canada. Alors que chaque année la filière agricole fait entendre ses difficultés financières au regard de prix trop faibles liés à une concurrence rude, le CETA entend encore renforcer la concurrence agricole en Europe.
De plus, au Canada, OGM, hormones et antibiotiques sont autorisés dans l’agriculture et l’alimentation. Bien que l’importation de bœuf aux hormones ou de maïs OGM reste dans un premier temps interdite en Europe, le consommateur européen ne pourra avoir aucune garantie quant à leur utilisation dans l’alimentation animale.
Qui plus est, le CETA a été construit comme « un accord vivant », c’est-à-dire qu’il met en place des procédures devant permettre à terme la convergence des normes réglementaires et environnementales. Dans le viseur : les OGM, les antibiotiques, les hormones … Personne ne s’en cache : une modification de ces règles risque très probablement d’être approuvée par l’Europe post-CETA. Un virage déjà emprunté par la commission européenne qui a autorisé cet été la commercialisation de 3 variétés de soja tolérantes au glyphosate (connu sous le nom commercial de Round Up®) provenant de la société Monsanto.

Le CETA dispense de démocratie

« Plus de lobbies pour plus de démocratie » (slogan de la manifestation)

Le CETA est le premier traité négocié avec un partenaire commercial membre du G7. Cet accord de libre-échange est sans précédent dans l’histoire commerciale européenne. De par son contenu et son importance, il n’a pas qu’un impact commercial mais aussi politique, démocratique et social. Pour que la population européenne en prenne connaissance, il faut un blocage de la Wallonie qui porte enfin l’attention de tous sur ces accords. Pourquoi une telle discrétion ? Pourquoi maintenir les européens dans l’ignorance si ces accords sont bons pour tous ?
Cette carence démocratique n’est qu’un début : le CETA s’en dispense totalement. Comment ? Avec l’aide des tribunaux arbitraux privés. Que sont-ils ? Ils existent malheureusement déjà sous le nom d’ISDS (Investor-State Dispute Settlement) mis en place dans certains accords commerciaux. C’est un mécanisme permettant de régler les différends entre investisseurs et Etats de manière unilatérale : seuls les investisseurs peuvent attaquer un ou des Etats via ces tribunaux lorsqu’ils jugent que la politique de ces dernières nuits à leurs investissements.
Un exemple célèbre: en 2012, Vattenfall, une société d’énergie suédoise réclame via un tribunal ISDS 4,7 milliards de dollars au gouvernement allemand pour compenser la fermeture de deux centrales nucléaires, conséquence de la politique environnementale de l’Allemagne. Face à ce risque, de nombreux gouvernements renoncent à mettre en place des politiques publiques: politique de lutte anti-tabac en Nouvelle Zélande pour ne citer qu’un exemple supplémentaire.
Si les entreprises peuvent attaquer les Etats sur leurs politiques publiques auprès de tribunaux privés, qu’advient-il de la démocratie et du droit des peuples ?

Le CETA oublie le climat

« Si t’aimes pas les écolos, casse leurs vélos » ; « écologie, démagogie » (Slogans de la manifestation)

Globalement, le CETA signe la fin des accords qui ont abouti de la COP21. Un pays souhaite mettre en œuvre des politiques environnementales et climatiques nécessaires ? Les investisseurs peuvent saisir les tribunaux d’arbitrage.
Un gouvernement souhaite promouvoir l’agriculture paysanne et l’agro-écologie ? Les produits agricoles ne sont plus protégés et en concurrence direct avec les agro-industries, qui inondent le marché de produits à bas prix, au détriment de l’environnement et de la qualité.
Le CETA souhaite la convergence des normes environnementales et réglementaires : nous n’avons aucune garantie que l’équivalence se fasse par le haut : le principe de précaution en Europe est sur un siège éjectable.
Quant à la logique de favoriser le libre-échange à l’échelle mondiale, elle va à l’inverse des politiques commerciales locales, et accroît les émissions de gaz à effet de serre.

Le CETA brade le service public

« Moins de fonctionnaires, plus de milliardaires » (Slogans de la manifestation)

Ce sont des questions qui se posent dans tous les Etats : qui doit prendre en charge dans une société l’éducation, la santé, l’approvisionnement en énergie, en eau, le transport …..? En Europe, c’est l’Etat, contrairement au Canada et aux Etats-Unis.
Ainsi, dans les accords commerciaux, les Etats établissent des listes positives : les secteurs qui peuvent être libéralisés. Le CETA change de logique et introduit les listes négatives. Comprenons : l’UE s’engage à libéraliser tous les secteurs, sauf ceux de la liste. Si certains publics sont oubliés, rien ne pourra les sauver de la libéralisation.
Enfin, quid de la nationalisation d’un secteur si un Etat veut en reprendre le contrôle ? Elle est de plus en plus compliquée : les autorités vont avoir les poings liés pendant des décennies.

Pour toutes ces raisons: nous sommes CONTRE cet accord de libre-échange, négocié en secret, qui met en place une justice commerciale des investisseurs au-dessus des justices des Etats, des gouvernements et des peuples. Nous condamnons ces accords qui sont construits selon le modèle économique néo-libéral sur lequel nous voulons revenir et qui a montré ses limites. Ce n’est pas sur la base de ces accords que nous serons capable et que nous aurons les moyens de construire autre chose.

Pour finir sur une note joyeuse : nous sommes POUR les échanges avec le Canada et les pays : POUR échanger les techniques, les innovations, les savoirs, les connaissances, la culture, les expériences, les débats, les idées …..

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