Réaction à la demande d’évacuation des campements Roms présents sur le campus

 
Monsieur le Président,

 
Alors que vous préparez avec la Préfecture du Nord l’évacuation du campement Rom de Lille 1, nous tenons à vous faire connaître nos arguments contre cette mesure. La demande d’évacuation est appuyée par des motifs confus et inappropriés. Ils ne justifient en rien une intervention traumatisante, disproportionnée et inefficace.

 
Premièrement, la circulaire du 26 Août 2012 prévoit qu’il incombe à l’autorité de proposer des solutions d’accompagnement en mobilisant prioritairement les moyens de droit commun de chacun des partenaires. Nous n’accepterons pas une évacuation sans possibilité de relogement. Un déplacement vers une aire d’accueil temporaire – impliquant donc un nouveau déplacement à suivre – contrevient à ces obligations.

 
Deuxièmement, les « conditions d’hygiène et d’insalubrité inacceptables » dans lesquelles vivent ces familles, selon vos propres motsi, ne peuvent être que détériorées par une évacuation. La destruction de leurs habitations et leur installation temporaire sur une autre parcelle aggravent la précarité et la vétusté de leur logement.

 

Troisièmement, les raisons de sécurité sont irrecevables pour justifier l’évacuation. Si des délits sont constatés sur le campus, il convient de rechercher et de punir les auteurs. Au lieu de cela, vous assimilez toute une population à ces auteurs. Et vous appliquez une justice qui n’en est pas une en les sanctionnant tous par l’évacuation. Serait-elle préventive, que vous auriez déjà fait ce dangereux amalgame.

 
Les problèmes d’insécurité à Lille 1 préexistent largement à l’installation des campements, et l’aménagement du campus a été identifié à plusieurs reprises comme un facteur majeur. Alors que les travaux ont été réalisés avec votre accord pour accueillir près de 50 000 supporters et des milliers de voitures tous les 15 jours, et tandis que vous envisagez des moyens disproportionnés – survol de la zone – pour compter les caravanes, n’avez-vous pas songé à engager le réaménagement du campus plutôt que de désigner des boucs-émissaires ?

 
L’évacuation n’a rien à voir avec les « conditions de sécurité, d’humanité et de respect de la dignité humaine » que vous évoquez dans les colonnes de Nord Eclair. Elle exprime, elle corrobore le rejet et la stigmatisation d’une partie de la population en dehors de l’espace urbain et de la société. Elle cause un préjudice démesuré à une population qui est déjà la plus fragile.

 

Un tel projet n’est pas digne d’un président d’Université, dans laquelle sont enseignées les sciences humaines. Comment justifier qu’avec cette responsabilité vous accréditiez des arguments et des méthodes faits d’amalgame, de stigmatisation, de brutalité ? Un sortie de crise nécessiterait de traiter les problèmes avec davantage de discernement, et sans céder au climat délétère qui entrave dangereusement l’intégration des populations Roms.

 

Nous espérons sincèrement que vous donniez une évolution plus humaine et profitable à tous à cette question. Votre obstination nous mettrait dans l’obligation de mobiliser autrement les étudiants.

 
Nous vous prions, Monsieur le Président, de bien vouloir recevoir nos salutations.

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