En décembre 2011, l’issue de la Conférence des Parties 17 (COP17) de la Convention Cadre des Nations-Unies sur le Changement Climatique (CCNUCC) à Durban a constitué une énième déception d’envergure pour les Jeunes Écologistes. À quelques mois de la Conférence des Nations-Unies sur le développement durable qui aura lieu à Rio de Janeiro (appelée communément RIO+20), les Jeunes Écologistes sont plus que préoccupés par l’apathie mondiale sur le climat. Alors que l’effet de serre s’amplifie et prend des proportions catastrophiques, la seule réponse globale apportée est pour l’instant celle du greenwashing mondialisé, où la croissance verte et la préoccupation rhétorique pour l’environnement ont fait une entrée fracassante.

 

 

Seule une démarche holistique, concernant l’ensemble de la communauté internationale permettra de s’en sortir vers le haut. Néanmoins, le processus propre à la CCNUCC est emblématique de la dictature des intérêts propres sur l’intérêt général. La seule solution est la mise en place rapide et générale de stratégies de réduction drastique des émissions, basée sur une sortie de la dépendance aux énergies fossiles, polluantes et limitées, une transition vers les énergies renouvelables et l’efficacité et la sobriété énergétique.

A ce jour, sont à l’œuvre trois processus internationaux majeurs, plus ou moins spécialisés, dédiés à l’environnement : la CCNUCC, la Convention pour la Biodiversité (CBD) et Rio+20, 20 ans après l’historique Sommet de la Terre (dont sont issues la CCNUCC et la CBD). Cette motion a pour but de livrer les positions et les propositions des Jeunes Écologistes sur ces processus en apparence complémentaires mais dont le point commun est l’incertitude régnant sur leur progression à court et moyen terme.

CCNUCC

Année après Année, COP après COP, la CCNUCC (nous) désespère. Les États parties à la Convention semblent tout simplement incapables de se mettre d’accord sur un Traité équitable, ambitieux et contraignant, comme demandé depuis de nombreuses années par les Jeunes Écologistes.

Nous dénonçons l’irresponsabilité des négociateurs qui se satisfont annuellement d’accords s’apparentant pour l’instant à des coquilles vides reportant à plus tard les décisions importantes dont l’adoption se fait pourtant chaque année plus urgente.

Les Jeunes Écologistes demandent la signature d’un accord équitable, ambitieux et contraignant, dans le cadre des Nations-Unies (seul cadre valable), permettant de limiter la hausse de la température moyenne à 1,5°C d’ici à 2100 par rapport à l’ère préindustrielle. Plus précisément, les travaux du GIEC indiquent que les conséquences du changement climatique seront gérables seulement si la concentration de CO2 par kg d’air se limite à 350 ppm (soit 0,35g par kg). Au-delà, les équilibres environnementaux et géopolitiques seront bouleversés. A titre d’indication, les dernières mesures de décembre 2011 font état d’une concentration de 391 ppm1… Si nous continuons en l’état, la hausse des températures sera de 4°C au minimum d’ici à 2100.

Pour parvenir à une limitation à 350ppm, les Jeunes Écologistes demandent :

  • du volontarisme politique de la part de l’Union européenne et de l’ensemble des Parties à la Convention. Nous nous félicitons de la proactivité de l’Union européenne dans ce processus. Cette dernière ne parle cependant pas assez d’une voix unifiée. En outre, l’UE doit « prendre les devants » et adopter unilatéralement des positions et des objectifs ambitieux : 40% de réduction d’émission d’ici à 2020. 80% d’ici à 2050. Les Jeunes Écologistes sont persuadés qu’une position d’avant-garde permettra d’enclencher un cercle vertueux au niveau international. Mieux : la mise en place d’un Green New Deal accompagnant et permettant ces engagements stimulera l’emploi. Ces objectifs ne sont pas utopiques, nombre d’études montrent qu’il est essentiel d’adopter des objectifs significatifs pour créer un précédent et enclencher un cercle vertueux.

 

  • Le déblocage de fonds significatifs pour l’adaptation aux changements climatiques et pour l’atténuation. La Banque Mondiale a établi qu’entre 2010 et 2050, les coûts de l’adaptation au changement climatique au niveau mondial seraient de 75 à 100 milliards de d’$ par an. Les pays en voie de développement seront les plus touchés et devront assumer la plus grande partie de ces coûts. La création d’un Fonds Vert confirmée par le COP 17 est un pas positif mais il n’est pour l’heure qu’une coquille vide en attente d’être financée et dont la gouvernance n’est pas acceptable (piloté par la Banque Mondiale). Ce « Fonds Vert » doit être administré par une nouvelle structure faisant partie de la CCNUCC. Le mode de gouvernance pour ce nouveau fonds doit être transparent, il doit respecter l’équilibre Nord/Sud, avec la possibilité d’un accès direct au Fonds. Ces fonds doivent être nouveaux et additionnels : ils ne doivent pas être prélevés sur les fonds déjà utilisés pour l’aide publique au développement. Outre les fonds publics, de nouvelles sources de financement doivent être envisagées : taxe sur les transactions financières, taxe sur les transports maritimes ou aériens de passager ou de marchandises, taxe sur les ressources fossiles, taxes sur le marché carbone ou les allocations carbone des pays (dans le système communautaire d’échange de quotas d’émission)… Ces solutions potentielles ont le mérite de fournir des montants importants (plusieurs dizaines de milliards de dollars par an), sont prédictibles, assurent une additionalité claire et concrétisent la logique pertinente du « pollueur-payeur » indispensable à un changement radical de nos modes de production.

CBD

La COP de la CBD se réunit toutes les deux années. La COP 11 se réunira en Inde en octobre 2012.

Au Japon, en 2010, un accord qualifié « d’historique » avait été alors trouvé lors de la COP 10. Cependant les Jeunes Écologistes le qualifie de trompe l’œil. Certes, 20 objectifs ont été adoptés, ainsi qu’un protocole sur l’accès et le partage des avantages tirés des ressources génétiques et des savoirs traditionnels associés pour mettre fin à la biopiraterie. Cependant aucun des principes n’est juridiquement contraignant. Pire, aucun financement multilatéral n’est aujourd’hui défini. On reste, comme d’habitude, dans les vœux pieux.

En outre, l’accord se fonde sur un pilier central qui pourrait bien s’avérer problématique et contre productif dans le futur : la valorisation économique et rémunération des services écosystémiques, soit une monétarisation des écosystèmes. La logique est intéressante : changer la perception de la préservation des écosystèmes en chiffrant les services qu’ils rendent (tel le filtrage de l’eau par les forêts par exemple). Le but est de démontrer qu’il coûtera plus cher de reconstruire ces services que de préserver les écosystèmes en l’état, pour encourager une conservation active.

Le problème est que l’industrie pousse pour la création d’un mécanisme de marché basé sur la logique de compensation, sur le modèle de ce qui a été fait avec le carbone. Or, force est de constater que ce mécanisme est aujourd’hui un échec. Outre l’exploitation de failles éventuelles, il parait très difficile de trouver une méthodologie « universelle » pour chiffrer les services rendus.

Les Jeunes Écologistes s’opposent donc à cette mise à prix générale de la biodiversité et appelle les négociateurs et les dirigeants à prendre en compte cette logique mais à ne pas créer de marché de la biodiversité. En effet, la monétarisation des milieux naturels laisserait la porte ouverte à un phénomène massif de marchandisation du vivant totalement incompatible avec les valeurs écologistes.

En outre, sur le modèle de la CCNUCC, les Jeunes Écologistes appellent à un accord ambitieux, équitable et contraignant mettant un terme à la perte nette de biodiversité, allant à l’encontre du marché du vivant et reconnaissant des droits aux populations dites indigènes. L’accord doit aussi débloquer des fonds permettant aux pays les plus pauvres de sauvegarder leur biodiversité.

RIO+20

Le sommet des Nations-Unies sur le développement durable se déroulera du 20 au 22 juin à Rio de Janeiro. Rio +20 s’inscrit dans un cadre bien morne : échec total des Objectifs du Millénaire, blocage de la CCNUCC, crise systémique du capitalisme, urgence climatique toujours plus importante. La conférence se concentrera sur deux thèmes globaux : l’économie verte et le cadre institutionnel pour le développement durable (gouvernance).

Se voulant la plus inclusive possible, la Conférence a invité tous les parties intéressées à formuler leurs vœux pieux pour un monde meilleur. A l’heure actuelle, une « version zéro » d’un document censé servir de base pour la déclaration finale regroupe toutes les doléances émises. Il y a cependant fort à parier que celles-ci ne seront que peu prises en compte. Les États membres participant au Sommet se contenteront très certainement d’une déclaration sur les grands principes, sans portée juridique concrète.

Néanmoins, malgré notre scepticisme sur l’initiative, et dans l’espoir qu’il ressorte quelque chose de tangible de ce sommet, les Jeunes Écologistes appellent les décideurs participants à la Conférence à :

  • Convenir d’une définition claire et précise du concept d’économie verte. Celle-ci doit remettre en cause notre modèle de développement, tout sauf durable, acter la finitude de notre planète et jeter les bases d’un modèle reposant sur une justice sociale, économique et climatique. Cette définition doit aussi faire état d’une volonté d’aller d’ici à 2060 vers une économie reposant sur 100% d’énergies renouvelable, sans nucléaire, basée sur l’efficacité et la sobriété énergétique. Cette définition devra insister sur la relocalisation des économies, sur la priorité des circuits courts, et prendre en compte de manière prioritaire la nécessité de réduction de son empreinte écologique. Elle devra enfin acter l’échec du cycle de Doha et remettre en cause le fonctionnement néolibéral de l’OMC, responsable d’un appauvrissement généralisé des populations urbaines et rurales des pays du Sud.
  • Les État développés, et l’Union européenne en premier lieu, devront convenir d’objectifs chiffrés et datés, tendant vers la mise en place d’un Green New Deal et jetant les bases d’une société nouvelle, propre et équitable. Les Jeunes Écologistes les appellent à s’engager à réduire de 40% leur consommation d’énergie, leur émission de gaz à effet de serre et d’augmenter de 40% la part des énergies renouvelables d’ici à 2020. Ces engagements doivent constituer des objectifs juridiquement contraignants et non une simple déclaration de principes, trop facilement abandonnés au nom d’arguments économiques court-termistes.
  • Mettre en place une gouvernance équitable et démocratique pour la résolutions des défis environnementaux, à travers la création d’une Organisation Mondiale de l’Environnement sous l’égide des Nations-Unies. Cette OME réunira l’ensemble des conventions internationales liées à l’environnement et devra assurer la surveillance et l’évaluation de la mise en place et du respect des objectifs et des engagements pris par les États. Elle aura aussi pour mission de gérer les Fonds climatiques, et notamment le Fonds Vert, selon les modalités détaillées précédemment, ainsi que les Fonds pour la Conservation de la biodiversité, pour la réduction des émissions et pour les forêts (REDD+). Cette Organisation devra être financée majoritairement par des fonds propres, émanant des nouvelles sources détaillées plus haut.

Outre les États membres, cette organisation serait composée de représentants de la société civile et fondée sur une gouvernance inclusive, et ce à tous les niveaux de décision.
Enfin, comme corollaire devra être mis en place un véritable droit international contraignant de l’environnement, dont l’effectivité serait assurée par un Tribunal international de justice climatique. En outre, en élargissant la Convention de Genève relative au statut de réfugié de 1951, le statut des migrants climatiques devra également être institutionnalisé via la définition d’un droit d’asile environnemental.

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