Retour sur le RESS

Le régime étudiant de sécurité sociale (RESS) est né en 1946, quelques mois après la création du régime général, pour couvrir une population de 120 000 jeunes adultes, non salariés mais ayant besoin d’une protection sociale.

Il était initialement prévu d’intégrer les étudiants directement dans le régime général, mais l’unique organisation étudiante de l’époque refusait d’être assimilée aux salariés. En effet, les étudiants se destinaient pour beaucoup à des professions libérales (médecins, avocats…) et réclamaient à ce titre un régime spécifique : un régime délégué à une mutuelle étudiante contrôlée par les étudiants.

Cela a abouti à la création de la Mutuelle Nationale des Etudiants de France (MNEF) ayant pour but de jouer un rôle d’intermédiaire entre les étudiants et le régime général. Elle assure la gestion et est financée pour cela par la CNAMTS (Caisse nationale d’assurance maladie des travailleurs salariés) mais les remboursements sont faits par la Caisse Nationale d’Assurance Maladie des Travailleurs Salariés

En 1970, le gouvernement dirigé par Jacques Chaban-Delmas voyait d’un mauvais oeil cette mutuelle trop étiquetée à gauche et incitait à la création, pour la concurrencer, de mutuelles étudiantes régionales. Ce système s’est ensuite généralisé sur tout le territoire. Dès lors, deux opérateurs sont en compétition pour servir d’intermédiaire entre le régime général et les étudiants
La situation se complexifie encore dans les années 1980 puisque les mutuelles étudiantes se mettent à vendre, en plus de leur activité d’intermédiaire, des complémentaires santé.

Dans les années 2000, la MNEF est secouée par une série de scandales financiers : financement d’emplois fictifs et mise en place d’un système de fausses factures, essentiellement organisé au bénéfice du parti socialiste. La MNEF n’y survivra pas et la LMDE naitra à sa suite. Les SMER, quant à elles, ne seront pas épargnées par les mêmes troubles.

Les problèmes liés au RESS

Le système pensé pour une poignée d’étudiants au sortir de la seconde guerre mondiale a survécu jusqu’à maintenant mais a éprouvé de grandes difficultés à s’adapter aux évolutions du système de protection sociale et à la massification de l’enseignement supérieur.

Devant cette situation complexe, plus grand monde ne comprend ce système et cela empêche les étudiants qui dépendent de ce régime d’accéder aux soins dans de bonnes conditions, les renoncements aux soins liés à l’existence de ce régime pénalisant les étudiants.

Ce système de délégation défaillant est aussi très coûteux : 93 millions par an de frais de gestion (52€ par étudiant) dont au minimum 63 millions d’euros seraient économisables en cas de gestion directe par le régime général, d’autant que les sommes remboursées sont relativement faibles au vu de la population plutôt jeune, relativement en bonne santé et ayant peu recours au soins.

De plus, les mutuelles étudiantes qui sont censées assurer une action de prévention, mission pour laquelle elle sont financées, ont perverti cette activité en la transformant en opérations de communication visant à leur permettre de gagner des parts de marché sur la concurrence pour la gestion de la part sécu, et de vendre des complémentaires santé.

La Cour des Comptes a estimé que la somme versée par étudiant pour assurer la gestion de la délégation de service public (DSP) est bien trop généreuse et qu’actuellement la collectivité finance une partie des dépenses liées à la vente de complémentaires santé, alors même que les mutuelles étudiantes réalisent cette activité au même titre que n’importe quelle mutuelle ou compagnie d’assurance.

D’ailleurs, selon la Cour des Comptes, les complémentaires proposées par les mutuelles étudiantes sont moins intéressantes financièrement que celles vendues par les mutuelles généralistes.

Outre le flou savamment entretenu par les mutuelles entre le régime délégué et leur activité de vente de complémentaires pour maximiser les bénéfices, elles opèrent une désinformation généralisée des étudiants, ce qui amène de plus en plus d’universités à refuser la présence des mutuelles étudiantes sur les campus.

Par exemple, un étudiant déjà couvert par la mutuelle parentale en perd le bénéfice au profit d’une mutuelle payante et généralement de bien moindre qualité. De même, les mutuelles étudiantes informent insuffisamment sur la CMU-C dont beaucoup d’étudiants précaires pourraient être bénéficiaires s’ils en faisaient la demande.

La gestion directe par le régime général représenterait une simplification administrative massive et faciliterait la vie des 1,7 million d’étudiants concernés. Les délais de remboursement seraient considérablement raccourcis, les démarches restantes pourraient se faire dans les Caisses Primaires d’Assurance Maladie où le travail serait réalisé par du personnel formé à cette tâche. Les choses seraient bien plus simples pour les personnes devant actuellement basculer du régime étudiant au régime général ou inversement.

Le lobbying des défenseurs du statu-quo

Le système de DSP a survécu à de multiples remises en question au fil des années (rapport sénatorial, enquête de l’UFC-Que Choisir, contestation de syndicats étudiants…) et au flot ininterrompu d’étudiants et de parents qui sollicitent leurs députés et sénateurs face à ce qu’ils considèrent comme une escroquerie.

Notons que les personnes censées représenter les étudiants ne le sont que sur le volet complémentaire santé. En aucun cas l’activité obligatoire (sécurité sociale) de ces structures n’est associée à une représentation. Dans le cas de la LMDE, les administrateurs étudiants ont été démis de leurs fonctions depuis la mise sous administration provisoire de cette structure.
Le maintien de ce régime est intimement lié à l’intense lobbying des mutuelles étudiantes et de leur alliés qui ont su entretenir des liens étroits avec le pouvoir politique.

Pour les défenseurs de ce système, les étudiants auraient des besoins spécifiques, les mutuelles devraient par conséquent être gérées pour et par les étudiants afin d’entretenir un esprit mutualiste que certains jugent dévoyé.

Plus largement, cette question du régime étudiant de sécurité sociale met en lumière un problème profond du système de protection sociale français où chaque acte médical est traité deux fois, une fois par la sécurité sociale qui gère l’essentiel du remboursement et une seconde fois par la structure gérant la dimension complémentaire (mutualiste ou non), ce qui entraîne un surcoût estimé à 6,2 milliards d’euros par le Conseil d’analyse économique (CAE).

Nous, jeunes écologistes, étudiants ou non, ne pouvons rester inactifs…

  • quand un système défaillant provoque un accès dégradé aux soins ;
  • quand on entretient un système opaque qui a conduit à des détournements et à des emplois fictifs ;
  • quand la prévention santé est dénaturée pour ne plus être qu’un produit marketing ;
  • quand l’intermédiaire mis en place est inutile et coûteux.

C’est pourquoi nous nous prononçons sans réserve pour la fin du régime étudiant de sécurité sociale et une gestion directe par le régime général.

Les Jeunes écologistes s’efforceront d’informer sur le système actuel et militeront pour sa disparition.

SOURCES

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