Motion adoptée par la coordination fédérale du 28 avril 2013. Elle prend la suite de la motion « La refondation de l’École de la République doit être un projet écologique, social et humaniste ambitieux ».

Si l’École doit offrir à tous un socle de connaissances fondamentales, il est indispensable de faire évoluer les méthodes d’apprentissage scolaire qui confinent souvent à l’accumulation d’un savoir encyclopédique. Le système éducatif doit favoriser l’émancipation intellectuelle et l’autonomie, pour que tous réussissent leur intégration sociale, citoyenne et professionnelle. Il doit valoriser et favoriser la mobilisation de tous les savoirs et compétences, sans se limiter à la connaissance académique. Face au constat d’un système éducatif  rigide, il est nécessaire de repenser la pédagogie.

A) Encourager l’expression orale et l’expression en public

L’expression orale et la prise de parole en public sont essentiels tant dans l’activité citoyenne que dans le monde du travail.  C’est pourquoi l’École, dans ses missions d’épanouissement intellectuel et personnel, d’éducation à la citoyenneté et de formation au milieu professionnel, se doit non seulement de stimuler mais aussi de familiariser les élèves avec la prise de parole spontanée en enseignant notamment les règles du débat et de la discussion en public.

L’organisation des enseignements laisse encore une place trop rare à l’expression orale, guidée ou libre, et fonctionne toujours sur un mode d’apprentissage vertical où l’élève reste le plus souvent passif. En outre, cette propension à l’inaction inhibe l’intéressement des élèves au déroulement du cours et leur volonté d’adhésion aux méthodes d’apprentissage, ce qui a pour conséquence une mauvaise préparation pour affronter les nombreuses situations que l’on rencontre dans notre environnement et qui nécessitent une bonne aisance en public et de la confiance en soi. Cette situation crée donc de fortes discriminations entre les individus qui ont, ou auront, plus de facilités à s’exprimer à l’oral et ceux qui n’osent, ou n’oseront, pas.

En ce sens, il faudrait accorder une plus grande place à la pratique des exposés oraux et les mettre en valeur, et ce, dès le plus jeune âge. Dans cette même logique de renouvellement des apprentissages, il serait nécessaire d’encourager l’entraide mutuelle entre élèves en proposant des temps de travail collectifs, ce qui contribuerait à développer les échanges de savoirs entre les enfants. Par ce système, on entend proposer différentes manières d’aborder un même sujet ou un même problème, mais aussi valoriser l’expression orale à travers la reformulation des connaissances et des savoirs sans pour autant laisser les plus timides de côté.

Le travail sur l’oral doit s’effectuer de manière transversale à travers toutes les autres thématiques. La parole doit être libre et respectée par tous. Ainsi, au début de l’année, il y a édiction des règles de la parole, incluant notamment le principe de respect de l’autre. L’enseignant doit encourager fortement tous les élèves à participer à la discussion dès le début du parcours scolaire. En outre, celui-ci ne doit pas sanctionner les réponses des élèves, mais plutôt les encourager à les reformuler si elles ne sont pas satisfaisantes par exemple.

B) La prévention des conflits dans le système éducatif

Hors du cadre des conseils (de classe, d’administrations  etc.), les élèves sont peu associés à la vie quotidienne au sein de leur  établissement. Or, les violences physiques, orales et  psychologiques se développent dans les établissements et le climat de  vie y est de moins en moins serein.  Il est urgent de ne plus fonder la  gestion des relations entre élèves et entre élèves et professeurs sur le  principe de punition, mais sur le respect, la médiation, le changement  de comportement et la compréhension que toute violence peut être le fruit  d’une contrainte sociale. Pour cela, il est nécessaire de mettre plusieurs choses en place pour répondre à ces violences, mais aussi pour les prévenir :
Tout d’abord, la création dans chaque établissement d’un plan pour la  prise en compte des violences physiques, orales et psychologiques. Ce plan doit être porté par une équipe pédagogique augmentée et les élèves. Il doit rappeler que le respect est la base des rapports entre  toutes les personnes, et qu’ils peuvent s’adresser à n’importe quel  adulte qui les recevra avec indulgence pour raconter un fait. En début  d’année, ce plan serait expliqué aux élèves et signé par eux.
Deuxièmement, des élèves médiateurs doivent être désignés par leurs  pairs dans chaque classe. Ces élèves sont là pour aider à gérer les  conflits. Ils peuvent être à l’écoute de leurs collègues en cas de  demande et ensuite peuvent faire appel à une structure de gestion des  conflits avec l’aide des adultes. C’est toutefois aux adultes de rester  très attentif à toute modification de comportement des élèves, qui  pourraient indiquer un harcèlement.
Troisièmement, il est nécessaire de reconnaître que la sanction par  la punition est limitée dans son efficacité, car elle n’incite pas  l’élève à ne plus reproduire son comportement. En cas de problème, il est essentiel de mettre en place un plan de prévention de la violence.
C ) Vers une pédagogie de projet et d’éducation à l’environnement. 

Les notions de coopération, de partage et d’échange sont trop souvent considérées, dans notre système scolaire, comme peu compatibles avec la réussite individuelle. Dans une pédagogie où l’on valorise avant tout la capacité à assimiler une somme de connaissances et à la restituer dans un contexte de compétition constante, l’élève est davantage un enseigné passif qu’un apprenant actif. Les ambitions de la pédagogie de projet et de l’éducation à l’environnement sont de lui redonner son statut d’apprenant.

L’éducation à l’environnement vise à faire comprendre aux apprenants la manière dont ils sont partie prenante d’un monde et dont ils peuvent interagir avec lui. En favorisant le contact des apprenants avec la nature et le monde qui les entoure, en valorisant l’exercice de leur créativité, en les incitant à coopérer et à s’emparer ensemble des problèmes qui se posent à eux, cette logique pédagogique fait évoluer le monde-objet en un monde-projet. Pour ce faire, les travaux en groupe, la définition collective des objectifs d’apprentissage, l’autonomie dans la réalisation des projets seront grandement favorisés.

La finalité de la pédagogie de projet est de faire comprendre qu’il est plus efficace de travailler collectivement à la résolution des tâches, en complétant les aptitudes des uns par les savoirs des autres, que si chacun tente de les mener seul, dans une logique de concurrence et de comparaison comme c’est souvent le cas dans le système éducatif français. À partir du moment où cette conscience d’être un élément solidaire des autres au sein d’une société sur laquelle il est possible d’influer, l’élève passe d’une logique de consommation à une logique d’action.

Ainsi, la pédagogie de projet propre à l’éducation à l’environnement pourra contribuer à la formation de citoyens-débatteurs, de consommacteurs-résistants conscients du caractère systémique des problèmes que nous connaissons. Cette perspective différente renoue avec la finalité initiale de l’école, celle de préparer aujourd’hui les enfants d’une société à devenir demain les citoyens qui la constituent. »

D)  Valoriser l’imagination et la réflexion des élèves dès le plus jeune âge avec des débats ou des initiations à la philosophie (pratique) et  aux questionnements, pour susciter l’éveil et la curiosité.

L’imagination et la réflexion personnelle doivent être valorisées dès le plus jeune âge pour permettre aux élèves de devenir aussi bien des citoyens clairvoyants que des individus curieux et créatifs. Pour cela, il faudrait envisager la mise en place d’un créneau hebdomadaire de réflexion sur la société ou le monde qui entoure l’élève. Il faut renforcer ces ateliers de réflexion pour que les enfants puissent apprendre à élaborer des raisonnements personnels et développer une pensée critique.  Ainsi, arrivé à maturité, l’adolescent comprendra mieux l’intérêt des matières, dont la  philosophie, et sera plus ouvert aux réponses apportées par les grands penseurs. Cette discipline devra être réalisée à l’oral entre les élèves et participera à l’apprentissage de l’écoute d’autrui. Le professeur, quant à lui, devra superviser l’ensemble.

De plus, des efforts doivent être faits en matière d’éducation à la créativité en proposant davantage d’ateliers et de visites culturelles, en favorisant à la fois l’exercice de sa propre créativité mais aussi la rencontre et la compréhension de celle des autres. L’éducation à la créativité n’a pas qu’une fonction d’évasion. C’est également un excellent moyen pour favoriser la créativité, développer l’imaginaire, apprendre à se connaître, prendre confiance en soi mais aussi de développer ses capacités d’observation. Nous devons faire d’une culture perçue comme étant  »élitiste » une culture  »populaire » que chacun pourrait s’approprier en favorisant sa découverte dès le plus jeune âge.

L’apprentissage artistique à l’école primaire doit être renforcé par un temps hebdomadaire aussi bien théorique que pratique. Pour une plus grande démocratisation des interventions, les communes s’assureront de la collaboration d’institutions et organismes culturels avec les  établissements. Cette mesure permettrait aux enfants venant de milieux ayant peu – ou pas – de liens avec les arts et la culture de bénéficier d’une ouverture supplémentaire sur le monde. L’histoire de l’art permet de montrer aux élèves le lien et l’interdépendance qu’il peut y avoir entre une œuvre  d’art, l’Histoire, un événement et notre environnement quotidien.

En outre, l’Histoire des Arts peut permettre dans une certaine mesure de lutter contre l’exclusion parce qu’il ne s’agit pas d’un enseignement magistral ou purement encyclopédique. Il est évident qu’un savoir de base devra être préalablement acquis par le biais de recherches pour recontextualiser certains éléments essentiels à la compréhension  et  présentation d’un sujet choisi et/ou imposé. Par exemple, l’étude d’une œuvre d’art pourra amener les élèves à s’interroger sur de nombreux points : le pourquoi de sa création, ses répercussions ultérieures et actuelles, son éventuelle utilité dans la vie quotidienne.

De plus, l’Histoire des Arts pourrait permettre de remotiver certains élèves car elle suppose l’étude d’une œuvre en mobilisant les 5 sens favorisant ainsi l’interactivité. Le fait de découvrir une œuvre sans avoir besoin de connaissances de base permettrait à  l’élève d’apporter son point de vue et de développer son sens de la réflexion. En même temps, cela favorise la discussion car l’art est subjectif et chacun peut contribuer à apporter des éléments d’analyse. Enfin, l’Histoire des Arts permet d’établir une certaine proximité avec l’œuvre étudiée pour, pourquoi pas, contribuer au développement de l’appétence des élèves pour un type d’œuvre ou d’art, afin qu’ils aient envie, par la suite, de poursuivre seuls, en famille ou à nouveau dans le cadre scolaire, la découverte d’autres œuvres.

E) Repenser le rythme scolaire

Actuellement en France, les journées de travail sont trop chargées et ne permettent pas une acquisition efficace des connaissances. En particulier il est difficile de s’adapter aux besoins spécifiques de chaque élève. C’est pourquoi nous demandons la diminution du volume journalier de cours. Les heures ainsi dégagées devront servir non seulement à proposer des aides aux devoirs mais aussi à permettre des activités tout aussi épanouissantes pour les élèves (théâtre, groupes de réflexions, sports, loisirs, etc), accessibles à tou-te-s sans discriminations.

Les aides aux devoirs serviront à limiter les inégalités entre les élèves liés aux bagages culturels des parents mais aussi à apprendre l’entraide mutuelle. Les activités non scolaires permettront de repenser l’école au sein de la cité et non en dehors. Le temps de fin de journée devrait être d’au moins une heure. Par ailleurs, il faut repasser à une semaine de quatre jours et demi. En ce qui concerne la demi-journée, les collectivités locales, en accord la communauté scolaire (parents, élèves, professeurs) seront libres de la mettre le mercredi matin ou le samedi matin. En ce qui concerne le rythme annuel, la longue durée actuelle des vacances d’étés ne profite qu’au secteur du tourisme et aux classes aisées. En outre, le peu de semaines disponibles incite à intensifier le rythme, au détriment de l’apprentissage.

C’est pourquoi nous proposons la suppression de la première et de la dernière semaine des vacances d’été.

F) Apprendre à gérer le stress

Au sein de notre société, les enfants peuvent être soumis très tôt à divers types de pression : scolaire mais aussi familiale ou sociétale. De plus en plus d’enfants connaissent des situations qui peuvent être difficiles à gérer, comme le divorce ou la séparation de leurs parents. En outre, les activités extra-scolaires (le sport et les loisirs) peuvent s’avérer à double tranchant: d’un côté, elles permettent à l’enfant de développer certaines capacités et connaissance et d’être en contact avec le monde extérieur ; d’un autre côté, elles peuvent avoir un effet négatif si elles sont imposées, ou qu’elles développent un esprit de compétitivité accru et malsain source potentielle de stress. Enfin, il faut ajouter la fatigue due au rythme scolaire.

Il est donc nécessaire d’offrir aux enfants des lieux d’écoute où ils pourront aborder leurs problèmes quotidiens en petits groupes en compagnie d’un adulte. En outre l’école elle-même est bien souvent une cause de stress. C’est pourquoi il faut apaiser le rapport à l’école, ce qui passe non seulement par le changement de rythme, mais aussi par la transformation du système de notation (voir motion 2) et par la suppression de caméras de vidéo-surveillance qui ne sauraient remplacer l’humain. Des temps de relaxations au cours de la journée devraient être proposés.

G) Réaliser une étude nationale sur l’ergonomie du monde scolaire.

Il est inconcevable de repenser l’ École, les méthodes d’enseignement et la vie scolaire sans parallèlement repenser le cadre de vie dans lequel les élèves évoluent et passent près d’un tiers de leur journée. Une étude nationale doit être menée sur l’ergonomie du monde scolaire (éclairages, aménagements des salles de classes, bien être architectural etc.). Cette étude amènera à la production d’un  »livre vert » de recommandations à destination des collectivités territoriales accessible à tous.

SalleDeClasse

 

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